Frustrés d’avoir raté l’Apocalypse (Vin suisse et dormition: épisode 43)
Vin suisse et dormition : épisode 43 7 mai 2020
Au final, la pandémie aura surtout tué des gens qui étaient déjà malades et âgés. L’engorgement des hôpitaux, qu’il fallait éviter par le confinement, n’a tellement pas eu lieu qu’une partie des soignants a été mise au chômage technique. Et la deuxième vague pourrait n’être qu’un fantasme de statisticien. Ce discours, qui gagne en popularité même s’il n’est pas encore majoritaire, révèle plus qu’une opposition au choix politique qui a mené au confinement. Il laisse entrevoir une sorte de frustration que ce moment si particulier, que l’on peut voir comme l’étape initiatique de notre génération, n’ait finalement été «que ça». Comment romancer et idéaliser une situation extraordinaire où la contribution de la très grande majorité des gens s’est bornée à manger des chips sur le canapé. Même avec des très bons scénaristes, on reste très, très loin de «Walking Dead»…
La bouteille du jour
La dormition causée par le coronavirus va porter un coup très rude à un vignoble suisse déjà touché par la crise. Afin d’apporter un maigre soutien aux vignerons sur lesquels j’écris depuis quinze ans, j’ai décidé d’ouvrir une bouteille de vin suisse par jour de confinement (deux précisions: j’ai dit ouvrir, pas forcément finir, et vu que ma cave compte près de 600 bouteilles de vin suisse, je ne crains pas trop de tomber à sec).
Pinot P 2015 Domaine Grand’Cour
Servi avec une côte de bœuf Angus maturée septante jours par la Boucherie du Palais, ce Pinot puissant a plus que convaincu. Très belle robe dense, nez expressif de fruits des bois à peine mâtiné de notes épicées élégantes, attaque puissante, bouche ample encadrée par des tanins fondus, jus soyeux, finale persistante constituent les traits dominants de ce rouge équilibré, profond et au final, remarquablement sapide.
Un peu de culture sur le vignoble suisse
Peu connue hors des frontières neuchâteloises, l’entreprise des cousins Jungo et Fellmann est pourtant l’une des caves indépendantes les plus récompensées de Suisse romande. Et ce, pour les vins, comme pour la qualité de l’accueil.
Notre article sur la Cave des Lauriers.
Journaliste sur le vin, spécialisé sur le vignoble helvétique, j’habite à Montreux. Mi-mars 2020, cette petite ville animée sur les bords du Lac Léman est entrée, comme le reste du pays, en dormition (un terme religieux qui désigne une mort sans souffrances) pour cause d’épidémie de coronavirus. Travailleur indépendant, rédacteur en chef de l’édition francophone de VINUM, père d’une petite fille de trois ans, président d’un concours international (le Mondial du Chasselas), je dois désormais réorganiser à peu près tous les pans de ma vie privée et professionnelle. Traverser le confinement, et survivre au cataclysme économique qui le suivra, va être une aventure exigeante dont ce journal de bord entend garder la trace.
Alexandre Truffer
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