Des vins suisses à leur apogée (Vin suisse et dormition: épisode 33)
Vin suisse et dormition: épisode 33 25 avril 2020
En temps normal, je consomme beaucoup plus de vin hors du domicile – soit au restaurant, soit lors d’événements – qu’à la maison. Entre autres, parce que le risque de glissement dans une dépendance lourde de conséquence guette tous les professionnels du vin et qu’il est prudent de se garder quelques jours sans alcool par semaine. Le confinement qui dure depuis un peu plus d’un mois a eu l’avantage de me faire redécouvrir certaines bouteilles oubliées, ou laissées de côté trop souvent parce que l’occasion n’était pas la bonne. Le Chardonnay, un cépage qui ne m’a jamais semblé avoir tellement d’intérêt en Suisse romande, cité plus bas fait partie de ces crus remarquables exhumés un peu par hasard et qui procurent des émotions suffisamment mémorables pour me donner envie de m’atteler à la renaissance de la Nuit des Vieux Millésimes.
La bouteille du jour
La dormition causée par le coronavirus va porter un coup très rude à un vignoble suisse déjà touché par la crise. Afin d’apporter un maigre soutien aux vignerons sur lesquels j’écris depuis quinze ans, j’ai décidé d’ouvrir une bouteille de vin suisse par jour de confinement (deux précisions: j’ai dit ouvrir, pas forcément finir, et vu que ma cave compte près de 600 bouteilles de vin suisse, je ne crains pas trop de tomber à sec).
Chardonnay Réserve 2008 Domaine de la Colombe
Agé d’une douzaine d’années, ce Chardonnay élevé sous bois par Raymond Paccot avait du tonus, de la vitalité et de la fraîcheur. Il dévoilait aussi une robe dorée ainsi qu’un nez expressif qui mêlait des notes de fruits jaunes, de curcuma, de safran, une pointe de silex, une touche de jasmin, un rien de poire et un soupçon de litchi. Une belle bouche, profonde et ample, terminée par une finale persistante concluait ce remarquable Chardonnay de Féchy très apprécié lors d’un coronapéro à base de brochet du Léman fumé et de guacamole.
Un peu de culture sur le vignoble suisse
Le 8 juillet de cette année, une mauvaise nouvelle traverse le vignoble vaudois. Le phylloxéra s’est installé à Founex. Cet insecte, arrivé par bateau des Etats-Unis, va dévaster la quasi-totalité des vignes européennes. Les parcelles reconstituées seront composées de plants européennes greffés sur des porte-greffes américains résistants. Le travail de reconstitution offre l’opportunité de modifier l’encépagement traditionnel.
Troisième partie d’un dossier paru dans le hors-série Vaud 2017 qui revient sur l’histoire du vignoble vaudois au travers des Premiers Grands Crus vaudois.
Journaliste sur le vin, spécialisé sur le vignoble helvétique, j’habite à Montreux. Mi-mars 2020, cette petite ville animée sur les bords du Lac Léman est entrée, comme le reste du pays, en dormition (un terme religieux qui désigne une mort sans souffrances) pour cause d’épidémie de coronavirus. Travailleur indépendant, rédacteur en chef de l’édition francophone de VINUM, père d’une petite fille de trois ans, président d’un concours international (le Mondial du Chasselas), je dois désormais réorganiser à peu près tous les pans de ma vie privée et professionnelle. Traverser le confinement, et survivre au cataclysme économique qui le suivra, va être une aventure exigeante dont ce journal de bord entend garder la trace.
Alexandre Truffer
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